Le DossierBalade dans les ocres avec Alain pour le circuit

et Nicole pour la Géologie

mardi 12 avril 2005

 

21 randonneurs se retrouvent dans la forêt des sablons à Mormoiron. Alain nous guide à travers les bruyères, les cistes, les châtaigniers qui trahissent l’origine siliceuse des ocres. Nous atteignons le Vallat de la Naye et longeons une falaise trouée d’anciennes galeries d’exploitation de l’ocre. Ici, comme aux demoiselles coiffées de Bedoin, le sol, les falaises sont constitués de sables ocreux. 

Les sables ocreux sont des sables marins qui se sont déposés à l’Albien-Crétacé moyen, ère secondaire, moins 100 millions d’années (- 100 MA). 

A cette époque, la région est un bord de mer et reçoit les débris de l’altération des roches préexistantes (le granite et gneiss), qui constituent les Cévennes et le massif Central ? Il y a des quartz, des micas, des feldspathes, de l’argile, des zircons qui permettent de dater les minéraux par la radioactivité. 

Toutes les collines de sables ocreux présentent la preuve de leur origine marine. C’est la stratification entrecroisée, vestige des dépôts faits par les courants marins que nous observons tout au long de la balade; 

Mais revenons à l’ère secondaire : c’est la surrection de l’isthme durancien et les sables déposés précédemment se retrouvent hors de l’eau, en domaine continental, sous climat tropical humide. Ils sont verts, colorés par un minéral argileux : la glauconie. 

Après la surrection de l’isthme durancien, ces sables subissent de profondes altérations, marquées par la disparition des argiles et glauconies dissoutes par l’eau de pluie et par des transformations minéralogiques. 

Apparaissent, une nouvelle argile, la Kaolinite et un hydroxyde de fer, la Goethite, conférant à ces sables les couleurs rouge, orange ou jaune. 

Nous reprenons notre balade, ce 12 avril 2005, une large piste nous mène au Vallat des Sitos, une gorge étroite, ouverte dans les ocres rouges qui présente un microclimat chaud et humide. La végétation est luxuriante. Les fougères : Polypodes, tapissent les parois abruptes, les racines des châtaigniers se fraient un passage jusqu’à pendre au dessus de nos têtes. Les bogues de châtaigne tapissent le sol forcément siliceux.  

Et puis la gorge s’ouvre sur un cirque. Sur les bords, les sables passent du rouge au jaune, pour finir par des sables blancs au sommet.

Les troncs d’arbres arrachés lors de la dernière tempête barrent la route. Les parois du cirque sont recouvertes de polypodes morts l’année de la sécheresse. Les mousses, le liére tentent de les recouvrir et de cette paroi circulaire des gouttes d’eau suintent malgré l’hiver sec.  

Il faut s’imaginer quelques dizaines de M.A. en arrière. Les sables s’étaient déposés sur le bord calcaire du Ventoux ; il y avait « continuité » entre le calcaire marneux du Ventoux, perméable en grand, et les sables argileux donc imperméables. 

Lors de chaque pluie, l’eau chargée de CO2 attaque le calcaire (qui est le carbonate de calcium insoluble), le dissout, le transformant en bicarbonate de calcium soluble et pénètre dans le massif de calcaire. Une goutte s’ajoute à une goutte et cela forme une rivière souterraine qui ressort à l’air libre à la faveur d’une strate imperméable. Ici cela n’est pas aussi spectaculaire qu’à fontaine de Vaucluse mais le principe est le même. 

Lorsque la sortie à l’air libre est suffisamment forte, le sable est emporté, le cirque apparaît et puis la gorge étroite se creuse.

Voici pour le cadre. 

Le microclimat chaud et l’humidité du lieu entraînent le développement d’une végétation luxuriante sur les parois du cirque. 

Comme les hommes, les végétaux sont constitués d’eau, de sels minéraux de matière organique (Glucides, Lipides, Protides). Mais pour se nourrir, ils n’ont besoin que des éléments minéraux. Grâce à l’énergie du soleil qu’ils captent par la chlorophylle des feuilles, ils fabriquent eux-mêmes leur matière organique lors de la photosynthèse. 

Les fougères et les mousses de la paroi du cirque ont l’eau à domicile grâce à l’eau d’infiltration dans le calcaire. Cette eau contient aussi le CO2 (gaz carbonique) nécessaire à la synthèse de la matière organique. Donc, les mousses et les fougères prélèvent directement le CO2 du bicarbonate de calcium (dissout dans l’eau) qui devient du carbonate, c’est-à-dire du calcaire solide qui se dépose immédiatement autour de la plante la transformant en roche calcaire d’origine chimique. C’est le TUF qu’on trouve sur et au pied des parois du cirque. 

Nous quittons ce cirque du bout du monde et revenons sur nos pas pour rejoindre les vestiges du site d’exploitation des ocres du Sablon qui débuta vers 1887. 

Extrait à ciel ouvert ou en galeries, le sable ocreux était lavé sur place selon un procédé datant des Romains. Le soleil et le vent asséchaient les bassins de décantation. La poudre récoltée, après broyage et pulvérisation fournissait une gamme de tons allant du citron au rouge très foncé.

Nicole

Et voilà ! fin de notre merveilleuse balade que nous avons tous appréciés grâce à notre guide, Alain et Nicole qui nous a fait cet exposé géologique remarquable.

Ainsi, la randonnée est devenue culturelle et très intéressante. Mais bien sûr, la tête et les jambes n’est-ce pas l’idéal ?

Merci à vous deux, amis, ce fût un vrai moment de bonheur… 

Chantal